réchauffement climatique illustré par la fonte des glaces - Label LUCIE

Le réchauffement climatique fait parler de plus en plus de lui. Dans son numéro de décembre 2017 - janvier 2018, Harvard Business Review intitulait son dossier « Réchauffement climatique – Le développement durable, c’est rentable ». Comme pour une fois ce n'est pas LUCIE qui le dit :), on vous propose une synthèse de ce dossier !

La synthèse porte sur la 1ère partie, écrite par Andrew Winston. Il est conseiller en stratégie environnementale et auteur de « The Big Pivot: Radically Practical Strategies for a Hotter, Scarcer, and More Open World » (Harvard Business Review Press, 2014).

L’idée principale est la suivante :

  • Le défi : le changement climatique et la raréfaction des ressources naturelles nécessitent un changement de paradigme  radical de la part des entreprises pour continuer à créer de la valeur et prospérer.
  • La stratégie : entreprendre « le grand pivot » (ou plus loin de « Les stratégies de pivot ».)
  • Le résultat : cela permettra aux entreprises de développer leur résilience. Elles en tirent des bénéfices économiques tout en contribuant à la prospérité pour tous.

Le constat : réchauffement climatique et dégradation de l’environnement implique la dégradation des profits et de la prospérité mondiale

Les catastrophes naturelles (ouragans, typhons, inondations…) dues au réchauffement climatique ne se comptent plus. Leurs conséquences économiques sont de plus en plus fréquentes. Elles sont aussi coûteuses (destructions, interruption de chaînes d’approvisionnement, ruptures d’alimentation en énergie…). De plus, on assiste depuis le début des années 2000 à un revirement de situation sur les prix des matières premières. Celles-ci augmentent de manière spectaculaire après une baisse généralisée tout au long du 20ème siècle.

Parmi les effets du réchauffement climatique, un des exemples cités est celui du coton : « C’est ainsi que le coton a vu son prix augmenter de 300 % en deux ans, forçant les fabricants et distributeurs de vêtements à choisir entre la répercussion des coûts sur les clients (et donc une baisse des ventes), ou le maintien des prix, ce qui se traduit par une réduction des marges ».

Les profits des entreprises et la prospérité mondiale sont en effet menacés par les conséquences du changement climatique et de la raréfaction des ressources. Ces menaces sont aujourd’hui aussi sérieuses que « les évolutions démographiques déséquilibrantes » ou que l’effondrement du système financier. Elles constituent des « mégadéfis ». Comme l’écrit Andrew Winston : « Pour les relever, tous les acteurs de la société (gouvernements et institutions publiques, secteur privé et citoyens) doivent agir ensemble. Mais c’est aux entreprises, qui disposent de ressources financières et matérielles, de capacités d’innovation et de talents uniques, qu’il incombe de mener la marche ».

« Un monde extrême a besoin d’un changement extrême »

Dans les dix dernières années, les entreprises ont amélioré progressivement leurs actions en matière de préservation de l’environnement. Cependant elles ont souvent été orientées vers des retours à court terme, comme des mesures d’efficacité énergétique par exemple.

« Il est temps de dépasser ce minimum. Un monde extrême a besoin d’un changement extrême ».

Certaines sociétés l’ont compris. Elles commencent à entreprendre ce que l’auteur appelle « le grand pivot ». Il peut être défini comme :

« un changement profond en matière de stratégie, d’opérations et de philosophie d’entreprise qui les rendra plus résilientes et les aidera à créer de la valeur nouvelle dans un monde de plus en plus chaud et aux ressources limitées ».

Cette résilience que les entreprises doivent accroître est double :

  • Résilience aux coûts et aux risques : par la réduction de la dépendance aux ressources naturelles (par exemple par la production d’énergie renouvelable sur site).
  • Résilience des revenus : en anticipant et en s’adaptant à l’évolution de la demande des clients. Ils seront tous confrontés à ces défis environnementaux (création de produits et services pour une économie plus propre et plus circulaire).

Comme le rappelle l’auteur, « une entreprise ne peut croître indéfiniment sur une planète finie ». Il fait deux constats qui méritent d’être soulignés :

  • « Les entreprises qui comprennent comment le changement climatique et la pénurie de ressources affectent l’ensemble de leur chaîne de valeur (des matières premières jusqu’au recyclage des produits) seront mieux positionnées pour conserver ou accroître leurs parts de marché. Elles seront également capables de relever les plus grands défis de la société et de bâtir un monde plus prospère pour tous ».

  • « In fine, ces stratégies les aideront à changer de cap en passant de la maximisation des profits à court terme (tout en traitant les enjeux environnementaux et sociaux comme des questions secondaires) à une gestion faisant de la résolution des plus gros problèmes du monde la première des priorités, puis d’exploiter les outils du capitalisme (marché, concurrence) pour le faire de manière rentable ».

Les stratégies de pivot

Les entreprises doivent transformer leurs stratégies en profondeur afin de développer leur résilience. Le « grand pivot » d’Andrew Winston s’articule autour de 3 axes :

Vision

Les entreprises doivent sortir du système court-termiste dans lequel elles sont inscrites. Elles doivent aussi innover de façon radicale, en définissant une nouvelle vision de long terme avec des objectifs basés sur la science. L’auteur cite des exemples de succès de « croissance dans un monde de rareté » de marques telles que Patagonia, Ford, General Motors, Nestlé, Alcoa, Kingfisher.

Valorisation

Les entreprises doivent également redéfinir leur mesure de rentabilité des investissements en intégrant la valeur du capital naturel et en intégrant les coûts et bénéfices non estimés.

Ces derniers ont 2 formes possibles :

  1. Les externalités : elles peuvent être négatives (pollutions, surexploitation des ressources naturelles, ...) ou positives (création d’emplois, de richesses sur le territoire, ...).
  2. Des éléments difficilement mesurables : les services rendus par la nature (eau, air, stabilité du climat, ressources naturelles, etc.). On les regroupe sous le terme de capital naturel. Il n’est la plupart du temps pas pris en compte par les entreprises. Et selon les principes économiques de base, on n’investit que dans ce qu’on mesure. La non-mesure et le sous-investissement dans le capital naturel constitue donc un risque économique majeur.

Partenaires

Il s’agit de collaborer de façon radicalement nouvelle. L'objectif est de permettre aux entreprises d’aller au-delà de leur capacité à elles seules. Cela implique la création de partenariats avec 3 grands types d’acteurs : les gouvernements, les entreprises, les clients.

Avec les gouvernements, il s’agit de mettre en place des actions de plaidoyer et de lobbying afin de créer des avantages compétitifs (par exemple sur la tarification du carbone, des normes d’efficacité énergétique ou via des partenariats public-privé).

Les entreprises ont aussi intérêt à collaborer ensemble, à commencer par leurs fournisseurs voire leurs concurrents dans certains cas. L’article cite l’exemple à succès de Coca Cola sur la recherche d’alternative aux hydrofluorocarbones (gaz à effet de serre extrêmement puissants).

Enfin, les entreprises ont un intérêt évident à collaborer avec leurs clients. Une partie de l’empreinte environnementale des entreprises est issue de l’amont (fournisseurs) mais aussi de l’aval (clients). Parfois, cette dernière peut être très forte (dans le cas des voitures ou des lessives par exemple). Orienter ses clients vers des changements de comportements est nécessaire mais aussi bénéfique pour tous.

De telles stratégies permettront aux entreprises de devenir plus résilientes face aux impacts en cours et à venir. Elles pourront aussi permettre de développer de l’agilité face à une volatilité extrême et d’en tirer profit. Enfin elles pourront relever un défi sociétal en agissant pour un monde meilleur pour tous.